L’ONU, les Palestiniens et le projet E1

Suite à la reconnaissance d’un Etat de Palestine comme observateur non membre à l’ONU le 29 novembre dernier, Israël a pris plusieurs mesures de rétorsion. Notamment celle de reprendre la construction de nouveaux logements en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Un projet appelé E1 et qui est sujet à beaucoup de controverses.      

« Si Israël construit E1, c’est la fin du processus de paix et d’une solution à deux Etats ». Déclaration de Saeb Erakat, le négociateur en chef de la Palestine après l’annonce du gouvernement israélien de reprendre son projet de colonisation à l’Est de Jérusalem. 3000 logements pourraient voir le jour entre la colonie israélienne de Maale Adumim (une des plus peuplées de Cisjordanie) et Jérusalem-Est. Ce qui aurait pour conséquence de couper pratiquement en deux la Cisjordanie et affecterait de facto la viabilité d’un Etat palestinien.

Carte du projet E1

Carte du projet E1

Sur la carte, E1 n’est qu’un « petit » bout de terre de 12km2 mais géopolitiquement sa signification est bien plus grande.
En plus de couper la Cisjordanie horizontalement, E1 déconnectera un peu plus les villes palestiniennes, déjà très éloignées les unes des autres par les distances, le mur et les zones sous contrôle israélien. Il sera également difficile pour les Palestiniens d’accéder à Jérusalem-Est, qui est pourtant sensée devenir à terme la capitale de leur futur Etat.
C’est aussi un moyen pour Israel d’avancer dans son projet de « Grand Jérusalem » dont les frontières s’insinuent bien plus loin que celles de 1967.

Pour l’histoire, le gouvernement israélien a commencé à travailler sur le projet E1 en 1999. Les 12 km2 de terre ont alors été déclarés « State land » (terre d’Etat) par Israël, avec pour ambition d’y construire des habitations, des centres commerciaux, des hôtels, des routes ; le tout pour un budget total de 40 millions d’euros.
A l’heure actuelle, seul un édifice est actuellement érigé sur la zone E1, il s’agit du « commissariat central de Judée et Samarie ».

Jusqu’ici, E1 fait l’unanimité contre lui. En 2005, la pression de l’administration américaine (sous Bush) avait même contraint Israel à renoncer à ce projet. Mais le vote de l’ONU le 29 novembre dernier a relancé la machine, même si Israel se défend de toute mesure punitive.
En attendant, plusieurs pays européens sont montés au créneau. Les ministères des affaires étrangères français et britanniques ont convoqués les ambassadeurs israéliens en terme de protestation.

Mais pour l’instant, seule une décision politique israélienne est à même de stopper le projet. Sans cela, la construction de la zone E1 pourrait commencer courant 2013.

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Gaza / Opération Pilier de Défense / 14 novembre 2012 – 21 novembre 2012

Gaza city, 15 novembre 2012
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Le 14 novembre 2012, Ahmad Jabaari, le commandant de la branche armée du Hamas est tué par un missile israélien alors qu’il circule en voiture. Dans les minutes qui suivent, les différentes branches armées de Gaza répliquent en lançant des roquettes sur Israël. Quelques heures plus tard, le gouvernement israélien lance l’opération Pilier de Défense contre la Bande de Gaza.
November, 14th 2012. Hamas military-chief, Ahmad Jabaari, is killed by an Israeli airstrike while is driving. Minutes after, several armed groups in Gaza respond by firing rockets to Israel. Few hours later, the Israeli government launches the operation called Pillar of Defense against Gaza Strip.

1 semaine de conflit qui a fait 163 morts palestiniens et 6 morts israéliens.
A week of fighting, 163 Palestinian dead, 6 Israeli dead.

Voilà, en condensé, 8 jours de combats tels que je les ai vécus dans la Bande de Gaza.
Here it is, condensed, 8 days of fighting as how i experienced them in the Gaza Strip.

15 novembre 2012 : En raison des roquettes qui s’abattent sur le sud d’Israël, l’accès au checkpoint d’Erez est fermé par un barrage militaire. Il me faudra 4 heures pour rejoindre le checkpoint et entrer dans Gaza.
As rockets befall on Southern Israel, access to Erez checkoint is blocked by a military roadblock. It took me 4 hours to reach the checkpoint and enter Gaza.

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Pendant ce temps-là, le système de défense anti-missile israélien, Dôme de fer, intercepte des roquettes. Il en a intercepté plus de 400 pendant les 8 jours de conflits.
Meanwhile, Israel’s Iron Dome missile defense system intercepts rockets fired from Gaza. More than 400 rockets have been intercepted during the 8 days of conflict.

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Alerte à Tel Aviv. Une roquette s’abat à 12km au sud-est de la capitale économique israélienne. Sans faire de blessé. 2 autres alertes retentiront les 16 et 17 novembre.
Alert in Tel Aviv. A rocket hit an empty space 12km south-est from the Israeli economic capital. 2 other alarms will sound on November 16th and 17th.

16 novembre 2012 : De l’autre côté, les bombardements s’intensifient. Les clichés sont pris depuis la tour des médias, Al Shorouk building, à Gaza ville.
On the other side, bombings intensify. Pictures are taken from the media center, Al-Shorouk building, in Gaza city.

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gaza2

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Dans la journée, les sirènes retentissent à Jérusalem. La roquette tombe dans une zone inhabitée du bloc de colonies du Gush Etzion près de Jérusalem, sans faire de blessé.
During the day, sirens sound in Jerusalem. A rocket falls in an empty space in Gutsh Etzion settlements. No injury reported.

17 novembre 2012 : Vers 9h du matin, une énorme explosion retentit dans le centre-ville de Gaza.
Around 9am, a huge explosion resounds in central Gaza city.

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Ce jour-là, les bureaux du premier ministre du Hamas à Gaza sont également détruits dans un bombardement. La veille, Ismaël Haniyeh y recevait son homologue égyptien.
That day, offices of Hamas prime minister in Gaza are destroyed in an airstrike. The day before, Ismael Haniyeh received the Egyptian PM in that same building.

Au nord, une maison dans le camp de réfugiés de Jabalia est totalement détruite dans un bombardement. Il n’y a que des blessés.
Northern Gaza, a house in Jabalia refugee camp is totally destroyed by an airstrike. Only injuries are reported.

jabalia

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Dans l’après-midi, un bombardement touche le quartier de Gaza situé près du port.
In the afternoon, a bombing hits the neighbourhood close to Gaza seaport.

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18 novembre 2012 : Dans la nuit du 17 au 18, plusieurs missiles s’abattent sur une tour qui abrite des journalistes de la radio et de la télévision Al Quds. 6 journalistes palestiniens sont blessés.
During the night, several missiles fall on a building where Al Quds TV and radio journalists work in Gaza. 6 Palestinian journalists are injured.

Vers 7h du matin, c’est un autre centre des medias qui est visé. Celui où beaucoup de journalistes étrangers viennent travailler (notamment Radio France, BFM TV, Itélé, France 24, Le Figaro). Le tir touche le 15e étage d’où émet la Radio Al Aqsa, réputée proche du Hamas. Il n’y a pas de blessé. L’armée israélienne explique que le bâtiment abritait un centre de communication du Hamas.
Around 7am, another media center is targeted. The one where lots of foreign journalists work (Radio France, BFM TV, Itélé, France24, Le figaro). The missile hits the 15th floor where Al Aqsa (closed to Hamas) radio broadcasts. No injury reported. Israeli army explains that the building hosted a Hamas communication center.

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Un peu plus tard dans la journée, l’armée israélienne envoie des mails à plusieurs journalistes, leur faisant comprendre qu’il ne faut pas rester dans l’immeuble, qu’il peut être à nouveau visé. La tour Shorouk est évacué à la mi-journée.
Later on that day, Israel army sends emails to some journalists. We understand that we should not stay in that building because it might be targeted again soon. We evacuate Al-Shorouk building.

Les bombardements continuent, notamment sur le centre-ville de Gaza.
Bombings continue, especially on central Gaza city.

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Vers 16h, un missile touche un immeuble d’habitation dans le quartier Nasser de Gaza. Il s’agit de la maison de la famille Al-Dallo. Il y a 10 morts.
Around 4pm, a missile hits a building where the Dallo family lives in Nasser neighbourhood in Gaza. No one survived, 10 dead.

19 novembre 2012 : Pendant la nuit du 18 au 19, un commissariat de police de Gaza est bombardé.
During the night, a police station in Gaza is bombed.

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Les groupes armés de Gaza continuent de tirer des roquettes vers Israel. Sur cette photo, 2 missiles de type Grad lancés depuis le centre-ville de Gaza. En tout, près de 1500 engins seront lancés pendant les 8 jours de conflit.
Gaza armed groups continue firing rockets to Israel. On this picture, 2 GRAD missiles are fired from downtown Gaza city. In total, more than 1500 rockets have been fired during Operation Pillar of Defense.

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Le centre des médias que nous avons évacué la veille est à nouveau touché par une frappe.
The media center we evacuated the day before is bombed again.

20 novembre 2012 : Reportage à Zeitoun dans le nord-est de la Bande de Gaza, un quartier en première ligne en cas d’offensive terrestre. Israël est à moins de 3 kilomètres. Pendant l’opération Plomb Durci, ce quartier avait été durement touché. La famille Samouni avait perdu 29 de ses membres.
Reportage in Zeitoun, in the North-East Gaza Strip, a neighborhood at the front line in case of an Israeli ground operation. Israel is less than 3km away. During Operation Cast Lead, this neighborhood was heavily bombed. The Samouni family lost 29 of its members.

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Le ciel de la Bande de Gaza est très chargé : drones, F16, roquettes.
Sky over Gaza : drones, F16, rockets.

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La voiture de 2 journalistes palestiniens de la télévision Al Aqsa touchée par un missile israélien en plein centre-ville de Gaza. Les 2 hommes n’ont pas survécu.
2 Al-Aqsa TV journalists’ car destroyed by an israeli airstrike. They didn’t survived.

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En fin d’après-midi, l’armée israélienne lâche des tracts sur plusieurs quartiers au nord, à l’est et au sud de la ville de Gaza, leur demandant d’évacuer leurs maisons au plus vite pour se réfugier au centre-ville. Des centaines de familles quittent leurs quartiers dans la panique, la nuit vient de tomber.
Late afternoon, Israeli army is dropping flyers on several neighborhoods in Gaza (North, South, East) telling residents to evacuate their homes immediately. They are told to found shelter in central Gaza city. Hundreds of families leave their homes in panic. Night just falls.

Plus tard, le bâtiment qui abrite les bureaux de l’Agence France Presse à Gaza est visé par un tir de missile israélien.
Later, Israel hits Agence France-Presse building in Gaza airstrike.

21 novembre 2012 : 2h15 du matin, un missile s’abat à 50m de l’hôtel où nous logeons et travaillons (après l’évacuation du centre de presse 2 jours plus tôt). La déflagration est énorme, les vitres de l’hôtel explosent, sans faire de blessés.
2:15am. A missile hits a target 50m away from the hotel where we sleep and work (after the evacuation of our media center 2 days before). The blast is huge, windows explose. No injury reported.

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Des centaines de personnes ont passé la nuit dans une école de l’UNRWA à Gaza après avoir évacué leurs maisons la veille, sur ordre de l’armée israélienne.
Hundreds of people spent the night in an UNRWA school in Gaza after they were ordered by the Israeli army to evacuate their homes the night before.

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A la mi-journée, on apprend qu’un bus a explosé à Tel Aviv faisant une dizaine de blessés. L’angoisse s’empare de la Bande de Gaza. Tout le monde s’attend à une offensive israélienne imminente.
At midday, we learn that a bus exploded in Tel Aviv. There are dozen of injuries. Anxiety seizes Gaza Strip. Everyone is expecting an Israeli operation.

Finalement, en fin de journée, un cessez-le-feu est annoncé. Il entre en vigueur à 21h et la Bande de Gaza laisse exploser sa joie. Des dizaines de milliers de personnes sortent dans les rues pour fêter la nouvelle. Tirs de joie et feux d’artifice au programme.
Eventually, at the end of the day, a cease-fire is signed. It come into effect at 9pm and the Gaza Strip and thousands of Palestinians pour into the streets to celebrate. Celebratory bursts of gunfire, cheering and fireworks.

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22 novembre 2012 : Le jour d’après.
Les Gazaouis ressortent dans les rues, les commerces rouvrent. C’est aussi l’heure d’évaluer les dégâts. Direction le sud et Khan Younes avec l’ONG française Première Urgence.
The day after.
Gazans go back into the streets, shops open again. It is also time to evaluate the damages. Let’s go and see in the South, near Khan Younes district, with the French NGO Première Urgence.

Le pont qui relie le nord au sud de la Bande de Gaza a été détruit dans un bombardement 2 jours plus tôt.
The bridge connecting Northern and Southern Gaza was bombed 2 days before.

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Dans le district de Khan Younes, de nombreux immeubles d’habitation ont été visés. Toutes les familles sinistrées racontent la même histoire : des petits missiles sont largués pour prévenir la population d’un bombardement. Les personnes ont alors 2 minutes pour évacuer avant qu’un F16 vienne abattre sa cible.
In Khan Younes district, lots of houses have been bombed. All the families tell the same story : small missiles hit the ground to warn residents of an imminent airstrike. Then, people have 2 minutes to evacuate before a missile fired from a F16 destroys the building.

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Plus de lectures :

http://www.franceinfo.fr/monde/en-images-gaza-le-jour-d-apres-810287-2012-11-22

http://www.franceinfo.fr/monde/israel-gaza-une-semaine-de-conflit-dans-l-oeil-de-nos-reporters-809111-2012-11-21

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Mahmoud Abbas va à l’ONU

Une chaise pour la Palestine à l’ONU ?
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Encore ?

Oui, encore. Mais pas pour (exactement) la même chose.

Petit flashback : On est en septembre 2011, le président de l’Autorité palestinienne décide d’aller au Conseil de sécurité de l’ONU pour demander l’adhésion de l’Etat de Palestine en tant que 194e Etat membre de l’organisation.

Cela avait provoqué une ferveur inattendue dans les Territoires palestiniens, coincés entre l’occupation israélienne et un processus de paix au point mort depuis près d’un an. D’un coup, Mahmoud Abbas se retrouvait leader de tout un peuple, à l’apogée de sa carrière. Avec pour ambition de laisser une trace dans l’histoire.

Ferveur palestinienne à Ramallah le soir du discours d’Abbas à l’ONU le 23 septembre 2011.
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Finalement, ce fut un #epicfail. La Palestine n’a jamais obtenu les 9 voix nécessaires pour obtenir ce statut d’Etat.

Un an plus tard, c’est un peu la sinistrose dans les Territoires. Le statut quo grignote les envies et les espoirs. L’apathie a envahi les rues. Quoi de mieux alors que de retourner à l’ONU.

Ben, oui, pourquoi pas ?

Cette fois, c’est décidé. Mahmoud Abbas retourne à New York mais pas devant le Conseil sécurité. Devant l’Assemblée générale et ces 193 membres. Il s’agit d’obtenir un changement de statut. De passer de celui d’entité non-membre à celui d’Etat observateur non-membre. Un peu comme sur le même modèle que le Vatican.

Pour être sûr de ne pas se faire jeter de l’estrade, Mahmoud Abbas a multiplié les voyages diplomatiques ces dernier mois. Le lobbying. Car il s’agit d’arriver devant la tribune de l’Assemblée générale en étant sûr d’être soutenu par la majorité des Etats membres.

L’Assemblée générale, pour quoi faire ?

Les Palestiniens veulent obtenir le statut d’Etat observateur non-membre. Cet Etat s’appellerait la Palestine et se composerait de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza dans un territoire délimité par les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale.

L’autorité palestinienne met en avant le droit des peuples à l’autodétermination. Une norme internationale qui a permis l’indépendance et la création de nombreux pays dans le monde.

Aller à l’ONU c’est aussi se battre diplomatiquement et non militairement. Les Palestiniens rappellent d’ailleurs que l’Etat d’Israël est né grâce à la résolution 181 des Nations Unies. Et puis 132 pays reconnaissent déjà la Palestine en tant qu’Etat. Ce qui fait environ 75% de la population mondiale.

Qui est contre ?

Les deux principaux opposants à cette démarche de reconnaissance à l’ONU sont Israël et les Etats-Unis. Pour résumer, ils reprochent à Mahmoud Abbas de tourner le dos aux négociations de paix en agissant de manière unilatérale.

Pour tenter de court-circuiter l’affaire, le gouvernement israélien a brandi la menace des sanctions financières. Si les Palestiniens vont à l’ONU, Israël ne rétrocédera pas les droits de douanes que récupère chaque mois l’Autorité palestinienne. Cela représente environ 100 millions de dollars par mois.
Une somme importante quand on sait que l’Autorité palestinienne accuse un déficit de près d’un milliard de dollars. Mais les Etats arabes ont déjà annoncé qu’ils aideraient financièrement la Palestine en cas de mise à exécution de cette menace.

Barak Obama, lui, s’est contenté pour l’instant d’un coup de fil à Mahmoud Abbas pour lui demander de renoncer à sa démarche. En vain.
Le président palestinien a réaffirmé qu’il irait bien à l’ONU avant la fin du mois de novembre.

Et c’est tout.

Est-ce une démarche unilatérale ?

Dans l’absolu, oui. Les Palestiniens décident de demander une reconnaissance à l’ONU sans demander l’avis d’Israël.
Mais dans les faits, le processus de paix est au point mort depuis plus de 2 ans et les Palestiniens tentent donc de contourner ce blocage.

Il s’agit aussi de taper un grand coup contre la politique d’occupation israélienne. Depuis les accords d’Oslo signés en 1993, le nombre de colons en Cisjordanie a doublé, passant de 250 000 à 500 000 aujourd’hui. Et la tendance n’est pas à l’arrêt de la colonisation. Le gouvernement israélien vient d’annoncer la construction de nouveaux logements à Pisgat-Ze’ev (Jérusalem-Est) et Itamar (Naplouse).

Enfin, l’Autorité palestinienne ne cesse de le rappeler. Cela n’est pas un coup d’arrêt à la solution à 2 Etats. Un concept cher à l’administration d’Obama.

Etat observateur non membre, et après ?

En cas de succès, la Palestine pourra devenir membre d’autres organisations internationales comme la Cour pénale internationale et ainsi poursuivre l’Etat d’Israël.
Mais l’Autorité palestinienne est claire : cela ne changera rien sur le terrain sur le court terme. Les colonies ne vont pas disparaître du jour au lendemain.

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Abbas renonce au droit et retour et provoque la colère des Palestiniens

Dans une interview à la chaine de télévision israélienne, Channel 2, le leader de l’autorité palestinien a déclaré qu’il n’avait aucun droit de revenir vivre dans sa ville natale située aujourd’hui en Israël. Une déclaration qui choque l’opinion palestinienne qui milite depuis des années pour le droit au retour des 5 millions de réfugiés palestiniens.

En 1 minute et 30 secondes, Mahmoud Abbas a réussi à se mettre à dos une grande partie de la population palestinienne. Lui, qui est déjà très critiqué dernièrement.

httpv://www.youtube.com/watch?v=RWa0hUcTUFA&feature=youtu.be

Pour les non-anglophones, voilà la retranscription de l’interview :

MA : Aussi longtemps que je serais en poste, il n’y aura pas de 3e Intifada armée. Jamais. Nous ne voulons pas utiliser la terreur, nous ne voulons pas utiliser la force, nous ne voulons pas utiliser d’armes. Nous voulons utiliser la diplomatie, la politique, nous voulons utiliser les négociations, de la résistance pacifique, c’est tout.

Journaliste : Parfois votre télévision officielle, parle d’Akko, Ramla et Jaffa en tant que Palestine. Vous êtes vous-même originaire de Tsfat (nom hébreu pour Safed, ndlr), c’est ça ?

MA : Oui, de Tsfat !

Journaliste : avez-vous envie d’y aller ?

MA : bien sûr ! je veux voir Safed.

Journaliste : visiter ou y vivre ?

MA : J’ai visité Safed, une fois. Mais je veux voir Safed, c’est mon droit de voir Safed. Mais pas d’y vivre.

Journaliste : d’accord. Mais c’est la Palestine pour vous ?

MA : Pour moi aujourd’hui la Palestine c’est dans la frontière de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale. C’est comme ça maintenant et pour toujours. C’est la Palestine pour moi. Je suis un réfugié mais je vis à Ramallah et je pense que la Cisjordanie et Gaza sont la Palestine. Et les autres parties, Israël.

Vu comme ça, tout ça paraît anodin, banal. Un discours entendu et rebaché depuis plusieurs années.

En apparence.

Car, en profondeur, c’est un vrai bouleversement. Dès la diffusion de ces propos, une vague de consternation a déferlé sur les réseaux sociaux. Mahmoud Abbas s’est vu accolé des adjectifs peu flatteurs comme « traitre », « collaborateur » et d’autres beaucoup plus injurieux.
Certains ont préféré en faire de l’humour : (capture d’écran Twitter)

Où est le problème ?

Ce qui fait polémique tient en cette phrase prononcée par Mahmoud Abbas : « J’ai visité Safed, une fois. Mais je veux voir Safed, c’est mon droit de voir Safed. Mais pas d’y vivre ». Pour les Palestiniens, Abbas renonce purement et simplement au « droit au retour » des réfugiés palestiniens de 1948 et de leurs descendants. Un principe sacro-saint en Palestine depuis la création de l’Etat d’Israël.

C’est le cheval de bataille de toute une population et un des obstacle majeur à la conclusion d’un processus de paix. Les Palestiniens demandent à ce que les réfugiés et leurs descendants puissent revenir dans leur ville natale ou être indemnisés.
Israël refuse, en violation de la résolution 149 de l’ONU votée le 11 décembre 1948. L’article 11 stipule :

« Décide qu’il y a lieu de permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs voisins, et que des indemnités doivent être payées à titre de compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé lorsque, en vertu des principes du droit international ou en équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les Gouvernements ou autorités responsables  ;

Donne pour instructions à la Commission de conciliation de faciliter le rapatriement, la réinstallation et le relèvement économique et social des réfugiés, ainsi que le paiement des indemnités, et de se tenir en liaison étroite avec le Directeur de l’Aide des Nations unies aux réfugiés de Palestine, et, par l’intermédiaire de celui-ci, avec les organes et institutions appropriés de l’Organisation des Nations unies ».

« Abbas ne me représente pas »

Ce qui chose aussi la population c’est que Mahmoud Abbas parle au nom du peuple palestinien, sans lui demander son avis. Sur cette photo qui circule sur facebook, on peut lire « Je suis un Palestinien et Mahmoud Abbas ne me représente pas ».

Certains en appellent déjà à la démission de Mahmoud Abbas et ne se privent pas de rappeler que le chef de l’Autorité palestinienne n’a plus de mandat depuis 2009.

Il faut aussi penser aux réfugiés palestiniens installés hors de Cisjordanie. Les millions de personnes qui vivent depuis des années dans des camps au Liban, en Jordanie, en Syrie, et qui attendent qu’une seule chose : pouvoir rentrer chez eux.

Au siège de l’Autorité palestinienne, on tente de calmer les esprits et de minimiser la portée des propos du leader, en assurant qu’il ne s’agit pas d’un renoncement au droit au retour.
Les autres factions palestiniennes ne l’entendent pas de cette oreille. Le FPLP et le Hamas condamnent les propos de Mahmous Abbas. Le Hamas ironise même : « Si Abbas ne veut pas de Safed. Safed sera très honorée de ne pas recevoir quelqu’un comme lui ».

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Non, le Fatah n’a pas gagné les élections municipales en Cisjordanie.

Un bureau de vote à Al-Bireh, 20 octobre 2012
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La Cisjordanie votait pour la première fois depuis 6 ans. Un scrutin local pour renouveler les conseils municipaux. En tout, 93 localités étaient concernées et 500 000 Palestiniens appelés à voter.
Avec le boycott du Hamas, beaucoup prédisait un raz-de-marée du Fatah, le parti au pouvoir. Le raz-de-marée s’est finalement transformé en vaguelette.

Le pourquoi de ces élections.

Suite à la prise du pouvoir du Hamas à Gaza en 2007, la guerre fratricide avec le Fatah et le début de la division palestinienne, les leaders palestiniens ont décidé de reporter sine die toutes les élections prévues. Ce qui fait que depuis cette année-là, il n’y a eu aucun renouvellement des instances dirigeantes, qu’elles soient locales, législatives ou présidentielle.

Mahmoud Abbas n’a officiellement plus de mandat depuis 2009.

Pour calmer les esprits et les demandes de plus en plus incessantes d’élections, l’Autorité palestinienne avait annoncé un scrutin local pour juillet 2010. Finalement, il a été annulé, puis reporté, puis annulé, puis reporté. Pour finalement avoir lieu le 20 octobre dernier. Mais seulement en Cisjordanie, le Hamas ayant décidé de boycotter le scrutin pour des raisons politiques.

Jusqu’au dernier moment, les Palestiniens sont restés sceptiques, attendant une annulation de dernière minute. Qui pour une fois n’a pas eu lieu.
Mais le mal était fait. La campagne n’a pas mobilisé les foules et les meetings sont restés plutôt confidentiels.

Un électeur palestinien cherchant son nom sur la liste des votants à Al-Bireh, 20 octobre 2012.
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Apathie et division

Au final, ces élections présentées par l’Autorité palestinienne comme un sursaut démocratique n’ont mobilisé que 55% des électeurs. Un taux plutôt faible pour une société palestinienne d’habitude très politisée et comparé aux 75% des élections législatives de 2006. Comme le dit un politique palestinien, « il y a vrai ras-le-bol de la politique ».

Il faut dire aussi que les Palestiniens ont d’autres préoccupations. La crise économique enfle et touche de nombreuses familles. Les prix se sont envolés ces derniers mois, le kilo de tomates est passé de 0,50€ à 1,50€ et le litre d’essence frôle les 1,50€, alors que le salaire moyen ne dépasse pas les 300€.

Et puis surtout, la population en a marre de cette division entre la Cisjordanie et Gaza. Pour eux, elle affaiblit la cause palestinienne mais surtout elle déplace les priorités. La fin de la division devient plus importante que la fin de l’occupation.

Bureau de vote à Al-Bireh, 20 octobre 2012
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De son côté, le Fatah, le parti de Mahmoud Abbas, a privilégié une campagne légère, un murmure, misant sur le boycott du Hamas pour remporter les sièges et reprendre les grosses villes comme Naplouse, acquise au Hamas en 2005.

Une stratégie qui n’a pas plus à tout le monde au sein du parti, comme le raconte le politologue Khaled abu Khader : « Le Hamas a boycotté mais le Fatah s’est présenté. Et je pense que c’est une erreur. Le Fatah aurait du se retirer car ces élections ont à voir avec des services de proximité. Mais le Fatah ne l’a pas entendu de cette manière et cela a provoqué une scission. Certains membres n’ont pas souhaité suivre les têtes de liste du Fatah, ils ont créé leur propre liste indépendante et certains ont été tout bonnement renvoyés des instances du parti. Donc au final, le Fatah affronte le Fatah et ça ne fait qu’affaiblir le parti, accentuer les problèmes internes. »

Les listes dissidentes ont vu le jour un peu partout. Notamment à Naplouse emmenée par un ancien maire Ghassan Shakaa et à Ramallah avec la liste Abna Albalad. Deux listes qui ont remporté ces élections, laissant sur le carreau les têtes du Fatah.

La liste Abna Albalad à Ramallah.
Tout en haut à gauche, c’est Moussa Hadid, le futur nouveau maire de Ramallah
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La perte de Naplouse, Ramallah et Jénine.

A peine les résultats définitifs dévoilés, le Fatah a crié victoire, parlant « d’un large référendum populaire sur le programme politique du mouvement et sa performance nationale ».

A y regarder de plus près, le « référendum populaire » est plutôt un mirage. Selon la commission électorale, le Fatah remporte au final 440 sièges sur les 1051 en jeu. Soit 41% des voix. Un chiffre qu’il faut relativiser puisque le principal rival du Fatah (le Hamas) ne se présentait pas.
Mais surtout, le Fatah perd des villes importantes comme Naplouse (2e plus grande ville de Cisjordanie), Ramallah (siège de l’Autorité palestinienne) et Jénine (connue pour ses groupes de combattants contre Israël).
Le parti au pouvoir garde, en revanche, le sud du territoire avec Hébron, Jéricho et Bethléem.

Le centre-ville de Naplouse pendant la campagne, octobre 2012
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Ces élections qui devaient signer la victoire écrasante du Fatah se sont transformées en une mixture peu digeste pour le parti de Mahmoud Abbas.
Le parti est apparu divisé, renforçant du même coup l’unité du Hamas, il a perdu 27 de ces membres influents (renvoyés pour avoir conduit des listes dissidentes) et il se retrouve un peu plus marginalisé dans le nord de la Cisjordanie.

Quelles peuvent être les conséquences sur l’avenir politique des territoires palestiniens ? L’Autorité palestinienne peut-elle vraiment organiser des élections générales dans ce contexte sans risquer de perdre le pouvoir ? Que va-t-il advenir de la réconciliation palestinienne ? Et enfin, quel interlocuteur sera en mesure de représenter tous les Palestiniens face à Israël dans quelques années ?

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